Comment bien se brosser les dents ?
La question peut paraître triviale mais nous sommes encore nombreux à nous brosser les dents « vite fait bien fait » pour nous donner bonne conscience. Certes, on accomplit le rituel, mais d’une manière pas toujours très appliquée…
Par Jean-Christophe Moine | Ethnomedia
Vendée Globe 1988-1989 : Guy Bernardin abandonne la course à la suite… d’une rage de dents. Mais les relations entre santé bucco-dentaire et sport ne s’arrêtent pas à ces bobos, aussi retentissants puissent-ils être. Les sportifs ont en effet plus de risque que la moyenne de la population d’avoir une mauvaise santé bucco-dentaire. Pour plusieurs raisons. D’abord, leur dépense énergétique importante est compensée par des apports alimentaires, souvent sucrés et acides, propices au développement de caries. Ensuite, l’intensité de l’effort, l’essoufflement et le stress provoquent une diminution du flux salivaire (appelée xérostomie). Or, la salive joue un rôle de régulation du pH buccal, le maintien d’un équilibre acido-basique optimal étant nécessaire à une bonne minéralisation des dents et des os de la bouche, ainsi qu’à la prévention des caries (destruction par des bactéries de la partie dure d’une dent), des gingivites (inflammations de la gencive) et des parodontites (inflammations de tous les tissus qui entourent et soutiennent les dents).
Ces pathologies bucco-dentaires sont parfois à l’origine d’une inflammation des artères et de complications cardio-vasculaires chez les personnes à risque. Bien que ces maladies concernent peu les sportifs, ces derniers sont souvent atteints de tendinites, quelquefois provoquées par les micro-organismes migrant par voie sanguine des dents vers les muscles.
Enfin, une mauvaise occlusion des dents (la façon dont les dents supérieures « s’engrènent » avec les dents inférieures) peut modifier la posture, perturber le centre de gravité et, en contrariant les mouvements normaux des muscles, des tendons et des articulations, provoquer des traumatismes.
Côté dents, Charlie est chanceux, il n’en souffre jamais et ne développe pas de caries. Il ne néglige pas pour autant son hygiène bucco-dentaire : « je fais faire un contrôle complet de ma dentition une fois par an, et elle est à nouveau checkée au départ de chaque course, avec un panoramique dentaire qui permet de vérifier la bonne santé de mes dents. Cela fait partie du rituel. Sur le bateau, la brosse à dent est toujours à portée de main, mais j’avoue que dans les situations exceptionnelles d’une course comme le Vendée Globe, il m’arrive régulièrement d’oublier un brossage ! En revanche, ce qui m’a vraiment manqué sur cette course, c’est une brossette. La brossette interdentaire, c’est le petit outil indispensable ! Je l’utilise au quotidien et je conseille vivement de l’ajouter à sa trousse de toilette ».
Sportif ou pas, deux brossages par jour pendant au moins deux minutes, c’est le minimum syndical. Ensuite vient la méthode. D’abord, il faut exercer une pression très légère, pas la peine de frotter comme une brute. Sur la denture temporaire des enfants, un brossage horizontal et doux est recommandé. Chez l’adulte, on privilégie un brossage circulaire, complété par le passage d’un fil dentaire ou, mieux, de cette fameuse brossette interdentaire qu’affectionne Charlie, et que mon dentiste estime être la clé d’une hygiène irréprochable et d’une prévention efficace. Quant à la brosse à dents, elle devra être à poils souples pour éviter d’endommager les gencives et l’émail des dents. La remplacer tous les trois mois, comme indiqué sur l’emballage, n’est qu’une indication moyenne dont l’objectif, essentiellement commercial, est d’accélérer la cadence d’achat. Mais on peut attendre que les poils soient ébouriffés.
Le dentifrice ? Il doit être fluoré, conseille l’Assurance Maladie, car le fluor a la capacité de renforcer l’émail des dents (par un processus chimique qui le durcit), donc de les rendre plus résistantes à l’attaque des bactéries, sources des caries. Mais attention, l’absorption de cet oligo-élément en trop grande quantité peut entraîner une fluorose dentaire, qui touche environ 2 % des enfants en France, et se caractérise par un émail poreux et des lignes de déminéralisation sur les dents. Selon l’OMS, la dose maximale à ne pas dépasser est de 0,05 mg par jour et par kilo de poids corporel pour les enfants, tous apports confondus * (dentifrice, eau, alimentation), sans dépasser 1 mg/j. La teneur en fluor des dentifrices « spécial enfant » est réglementairement limitée à 500 ppm (50 mg/100 g), celle des dentifrices pour adultes peut aller jusqu’à 1 500 ppm. Au-delà, le dentifrice devient un médicament, vendu uniquement en pharmacie, et normalement réservé aux personnes qui ont un risque élevé de caries.
Si le porte-parole de l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFFSBT) s’émeut de la mode des dentifrices « bio », qui remplacent le fluor par des huiles essentielles ou d’autres substances naturelles, et considère que le fluor est « indispensable à la composition d’un dentifrice », rappelons que cette substance est préconisée dans nos dentifrices parce que nous mangeons bien trop sucré et gras. Bien se brosser les dents ET bien manger, et donc prendre soin de son microbiote buccal, ne serait-ce pas la clé pour utiliser moins de fluor ?
* En cas de doute sur les quantités ingérées, on peut faire un bilan des apports fluorés permettant de connaître, entre autres, la concentration en fluor de son eau de boisson, de son sel… et de son dentifrice.
A écouter sur apivia-prevention.fr, l’épisode du podcast « Les voix de la prévention » : Le docteur Alain Amzalag a une dent contre la maladie