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Du tout au rien pour APIVIA

Du tout au rien pour APIVIA
mardi 05 janvier

Du tout au rien pour APIVIA

Après les prises de ris dans la grand-voile et les changements de voile d’avant toujours plus petites, voilà que l’ensemble de la garde-robe estivale d’APIVIA est, de nouveau, sollicité. APIVIA glisse ce jour le long de la zone des glaces dans un flux modéré d’Ouest de 15 nœuds, avec pour volonté de contourner une vaste barrière anticyclonique qui barre la route plein Nord. Une route contrainte et obligée pour APIVIA qui pointe ce matin à 209,19 milles (387,42 km) dans le sillage du leader, Yannick Bestaven (Maître CoQ).

Ce caillou, le Horn, est bien unique… S’il ferme la porte des mers du Sud et de ses trains de dépression, il rouvre celui de l’Atlantique et de ses systèmes météo complexes. APIVIA et Charlie sont passés du tout au tout, ou plutôt du tout au rien… en moins de 24 heures. Baston au large du promontoire rocheux sud-américain avec des rafales à plus de 50 nœuds et des vagues de 7 mètres, tempête de calmes à gérer au-dessus de l’archipel des îles Falkland… Allez comprendre. Lorsque Jean-Yves Bernot (Lire Dans l’œil de…) déclarait qu’une page se tournait et qu’une autre s’ouvrait une fois le cap Horn passé, « le sorcier » a bien (toujours) raison. Preuve en est avec cet énorme anticyclone qui s’allonge, paisiblement, des côtes argentines à la zone des glaces, au fil des jours. Un anticyclone qui va s’imposer – latéralement – sur près de 1 000 milles, soit presque 1 900 kilomètres d’ici la fin de semaine !

« La transition météorologique est assez brutale au passage du cap Horn analyse Christian Dumard (Great Circle – Squid et prestataire météo pour la Direction de Course du Vendée Globe). Après les vents forts et la très grosse mer, les leaders doivent maintenant gérer l’anticyclone qui se forme dans le Nord de leur route. Cette zone de haute pression va s’étendre dans un premier temps vers la ZEA (Zone d’Exclusion Antarctique) avec une belle dorsale pour le mercredi 6 janvier, puis se déplacer vers l’Est, ce qui fermera la route « Est » en fin de semaine. » Complexe, compliquée cette situation que se doit de gérer depuis hier APIVIA. Après avoir emprunté le détroit de Le Maire, laissant l’ile des États et son célèbre Phare du Bout du Monde sur tribord (à droite), APIVIA a plongé plein Sud-Est pour optimiser au mieux sa stratégie d’approche de cette masse de haute pression, bien encombrante et bien délicate à gérer. De fait, après avoir subi les effets des hauteurs et les courants de la côte déchiquetée Patagonne, Charlie s’est vu contraint de se recaler dans le sillage de Yannick Bestaven (Maître CoQ), reportant à plus tard toute velléité de tenter une option météo différente.

Le but est actuellement de progresser le plus vite possible le long de la ZEA, afin de contourner par l’extrême Est la zone de haute pression. « L’anticyclone, c’est compliqué explique Charlie ce matin. J’ai retourné le problème dans tous les sens et je pense qu’il va me passer dessus à un moment donné. Ce n’est pas évident. Je fais des simulations de route pour trouver une solution. J’espère en avoir une, on verra dans 24-48h. C’est un anticyclone qui se déplace, ce n’est pas comme un anticyclone de l’hémisphère nord. Il bouge et la stratégie n’est pas évidente. Je vais faire au mieux, en tous cas je suis motivé, remonté, prêt à me battre sur cette remontée de l’Atlantique. Il reste 6 500 milles, je vais tout donner jusqu’à l’arrivée. » Plus de temps, plus de route, plus de précision dans les trajectoires qui se doivent d’être optimisées et peaufinées dans ce vent qui va faiblir au fil des jours jusqu’à buter, normalement ce soir, dans le dur de la masse… molle. Il faudra alors trouver le trou de souris qui permettra à APIVIA de glisser sur la bordure Nord de l’anticyclone, sachant qu’au-dessus c’est l’anticyclone de Sainte-Hélène qui reprendra ses droits entre l’Afrique du Sud et l’Argentine. Mais ça, c’est encore une autre histoire…

Le mot à retenir :

Charlie Dalin (skipper d’APIVIA) revient sur son expérience des Mers du Sud : « Pendant 30 jours, je n’ai vu aucun signe de vie humaine. On oublie la vie d’avant, comme on oublie la vie avant la pandémie. Moi, j’ai oublié la vie avant les mers du Sud. Les autres bateaux n’existaient plus, les terres n’existaient plus. Tu es dans un monde d’eau à l’infini… J’ai l’impression de revenir d’un monde d’eau où les terres sont des fantasmes. Je reviens d’une autre planète. J’ai vécu des choses que j’aurais vécu nulle part ailleurs, forcément ça aura une influence sur moi. »

Frayeur au large de l’île des Etats…

Dimanche après-midi, tout afficionado que nous sommes, avons remarqué qu’APIVIA allait embouquer le détroit de Le Maire. Cet étroit passage large de 16 milles (29,6 km), entre la pointe orientale de la Terre de Feu et l’île des États, est connu et reconnu des marins, car il fut très emprunté, avant que le canal de Panama ne soit percé, par les voiliers et autres navires du commerce maritime international. Réputé difficile et dangereux en raison de son étroitesse et de ses forts courants marins, il est également connu pour son imprévisible vent violent, le Williwaw, qui peut descendre des hauteurs (vent catabatique), rebondir littéralement sur l’eau, coucher les bateaux alors toutes voiles dehors et surprendre les équipages…

Si APIVIA n’a pas eu à faire face à ce vent si particulier, c’est un autre coup de vent qui a cueilli littéralement Charlie. « Par contre, j’ai eu un arcus* qui m’est passé dessus. Je me suis retrouvé en fait surtoilé… Des nuages d’orage comme celui-là, c’est la première fois que j’en voyais de mes propres yeux. J’ai juste eu le temps de rouler mon gennaker, avant qu’il n’arrive et me suis retrouvé sous grand-voile haute dans 30 nœuds. Ce n’était pas super sain… J’ai eu un petit coup de stress de finir dans les cailloux de l’île des États ».

*L’arcus est un type de nuage bas ayant la forme d’un rouleau ou d’un arc allongé sur un plan horizontal, apparaissant au cours d’un orage et situé à l’avant immédiat de la ligne des précipitations (pluie, grêle, neige…).

Repères APIVIA Vendée Globe 2020/21 :

  • Date et heure de la news : mardi 5 janvier – 9h00
  • Classement : 2e
  • Distance au 1er : 209,19 milles (387,42 km)
  • Vitesse : 17,97 nœuds (33,38 km)
  • Cap : 39°
  • Distance à l’arrivée : 6 399,81 milles (11 852,45 km)